KAM UNIVERSE
Le lemon/smut/spicy dans les histoires, et pourquoi les gens devraient se calmer
Cette partie combine à la fois mon opinion sur ce sujet et un petit coup de gueule que j'ai besoin d'extérioriser depuis un moment, tant je trouve que ça devient n'importe quoi.
Tout part d'Instagram, où je vois de plus en plus de personnes dénoncer l'abus de scènes de sexe dans la plupart des histoires actuelles (et c'est tant mieux) ! Je souhaite apporter ma pierre à l'édifice, à la fois parce que j'ai vu/vécu des trucs idiots en rapport avec ce sujet, et pour inviter les gens à prendre du recul et éventuellement à se remettre en question.
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Alors attention : si vous êtes amateurices du smut, c'est OK. Je ne suis pas là pour juger les goûts et les préférences de chacun, ni pour dénigrer le smut, d'autant plus que je ne suis pas totalement anti scènes de fesses pour autant. Mais c'est le fait d'en vouloir ou d'en exiger systématiquement à toutes les histoires, même celles qui n'en ont pas besoin, qui me fait tiquer. Et ce n'est d'ailleurs pas mon seul problème. Je développerai plus bas !
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Aussi, je ne vais pas mâcher mes mots dans cette partie. Ne soyez pas choqués si j'emploie des expressions vulgaires. J'écris comme les pensées me viennent, et j'ai pas spécialement la force ni l'envie de faire dans la dentelle pour un sujet qui me blase autant ! Au moins, vous êtes prévenus ! ^^
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Pour ceux qui ne savent pas, même si j'ai indirectement donné sa définition plus haut, le lemon ou le smut désigne des scènes de relations sexuelles explicites dans les histoires. Elles peuvent être plus ou moins nombreuses dans une même histoire, et plus ou moins détaillées. En gros, c'est de l'érotisme, voire de la pornographie en fonction du degré d'extrémisme. Et autant en retrouver dans des romans érotiques ne me pose aucun problème (vu qu'ils existent exprès pour exposer ce genre de scènes, justement), autant en demander à foison dans des genres qui s'y prêtent moins comme l'imaginaire, le polar ou même certaines romances douces, je ne trouve pas ça pertinent ni spécialement logique. Ça dépend des histoires racontées, cependant.
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Mon problème avec le smut se situe à plusieurs niveaux. Déjà, les messages véhiculés à travers. Dans certaines histoires, lorsqu'arrive la (ou les) scène(s) olé-olé, les caractères des personnages impliqués changent brusquement pour une raison obscure. Ils vont employer des termes vulgaires, ou faire leur bête de sexe comme s'ils étaient expérimentés dans le domaine alors que c'est leur première fois et qu'ils ne se comportent pas comme ça en temps normal. Dans d'autres, c'est hyper machiste avec l'homme robuste et ténébreux qui, forcément, domine la femme frêle et mièvre qui ne demandait en réalité qu'à se faire brutalement sauter de la sorte pendant une bonne partie du récit. Et même dans les romances homo, type MxM en particulier, c'est souvent ultra hétéronormé, avec l'un des deux qui se comporte comme le mec viril, dominant et dieu du sexe, et l'autre gars, complètement soumis qui se fait juste violemment empaler par derrière en piaillant comme un débile.
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Ce ne sont que des exemples parmi plein d'autres, mais ça démontre un certain manque de réalisme, à mon sens. En plus, on a très rarement la notion de consentement, les personnages, la plupart du temps, ne se protègent pas avant le rapport (ça peut se comprendre en fantasy, et encore... mais en contemporain, c'est quoi l'excuse ?), les premières fois c'est toujours un moment exceptionnel rempli de plaisir pour les personnages, alors qu'en vrai, c'est pas forcément le cas, et il n'y a aucune communication pendant l'acte alors que c'est une chose pourtant essentielle pour son bon déroulement. En résumé, on a juste du cul pour du cul, souvent mal écrit en plus, mais pour les émotions, les ressentis, les possibles doutes des personnages, on peut toujours courir !
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Encore, si c'était ça le pire... Après tout, les histoires fictives restent fictives. Rien n'empêche les auteurices "d'embellir" (notez les guillemets) le truc, s'ils cherchent avant tout à faire "fantasmer" leur lectorat. Le véritable souci, c'est lorsque les romans contenant ce type de scène tombent entre les mains de personnes pas suffisamment matures ou qui n'ont pas assez de recul pour savoir que les moments intimes, dans le cadre d'une relation amoureuse saine, ne se déroulent pas ou ne doivent pas se dérouler de ces manières (sauf si c'est voulu et consenti par les deux partenaires, chose qui n'est pas spécialement explicité, ni même sous-entendu dans certains textes).
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Ces lecteurices, souvent très jeunes, vont intérioriser ces moments comme étant quelque chose de normal et des modèles à suivre IRL. Et ça, c'est un gros problème car en découvrant qu'il n'en est rien lors de leurs premières fois, ils peuvent se retrouver déçus, traumatisés ou frustrés (ou même les trois à la fois dans le pire des cas). Et oui ! Ce n'est pas parce que c'est fictif que ça n'a aucune conséquence sur les gens qui les lisent, surtout si les gens en question n'ont pas la maturité nécessaire pour être confronté à des scènes sexuelles de ce style ! Il serait temps que tout le monde (les maisons d'édition, les libraires et les auteurices qui ne font pas de prévention en tête) prenne conscience de tout ça !
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Petite parenthèse vu que j'en parle, mais le manque de prévention dans les livres, c'est aussi un souci non négligeable. Je ne sais pas si la faute revient aux éditeurs ou aux auteurices, mais certains histoires contenant du sexe ne préviennent pas de sa présence. Ou du moins, pas de façon claire. Je trouve que les gens négligent un peu trop les triggers warning (ce sujet mériterait d'ailleurs un article à lui tout seul) alors que c'est une façon de faire comprendre qu'un livre ne convient pas à n'importe qui pour diverses raisons. Là je parle de sexe, mais les triggers warning servent aussi à prévenir de la présence de sujets abordés dans l'oeuvre qui sont difficiles, pour ne citer que ça. Et de la même manière que tout le monde n'a pas forcément envie de retrouver certains thèmes, tout le monde n'a pas spécialement envie ou besoin de lire une multitude de scènes de fesses dans un bouquin. D'où l'importance de prévenir de ce genre de contenu, que ce soit sur la couverture du livre ou dans une page dédiée aux avertissements ! Beaucoup aiment rejeter la faute sur les lecteurices car "ils sélectionnent leur lecture en connaissance de cause" (ce qui n'est pas faux, mais pas totalement vrai non plus), perso, je pense que les éditeurs, auteurs et libraires ont également leur part de responsabilité.
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Mon autre problème avec le smut, et là c'est à la fois une observation et un ressenti personnel : j'ai l'impression qu'il y a une hiérarchisation des relations. Déjà, les relations romantiques l'emportent toujours sur les relations platoniques et ce, même dans les histoires qui ne sont pas des romances. On a beau présenter de multiples relations variées, belles et intéressantes dans un même récit, c'est toujours (ou très souvent) la romance qui est la plus mise en avant par les auteurices et la relation la plus suivie et appréciée par les lecteurices. Ouais. L'amitié, la famille ou la rivalité saine, ça pue, apparemment !
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Et au sein même des romances, celles ayant des scènes de sexes explicites seront souvent favorisées à celles qui en sont dépourvus.
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Bon. Qu'on préfère les romances avec du cul en les jugeant "plus réalistes", "plus sexy", "plus intense", "plus mature et adulte" etc... OK. Je ne suis pas spécialement d'accord et j'estime personnellement que certaines romances n'ont pas besoin de sexe pour être appréciables, car l'amour véritable et mature ne repose pas uniquement, ni essentiellement sur le plaisir charnel, mais OK !
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Seulement, est-ce une raison pour en réclamer absolument partout, même dans des genres qui, de base, ne se prêtent pas spécialement au smut à répétition ?
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Ça me permet de transitionner sur mon troisième et principal problème : les comportements de certaines lecteurices, qui influencent parfois les décisions des auteurices. Beaucoup réclament automatiquement des scènes sexuelles dans leurs lectures, et ce, peu importe qu'il s'agisse de romance, de fantasy, de science-fiction, de drame, de thriller et j'en passe. Certains affirment même ne pas vouloir lire un livre s'il n'y a pas de "spicy" dedans (chose que je trouve stupide car on lit un livre avant tout pour découvrir son histoire, son univers et ses personnages ! Pas pour se pignoler ou fangirler/fanboyer devant un texte racontant une scène de cul en long et en large ! Les sites/magazines/films/romans porno existent pour ça.). Par conséquent et fatalement, certains auteurs en quête de reconnaissance et de bons retours sur leurs histoires vont en mettre pour répondre à cette demande de plus en plus grandissante.
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Et en vrai, j'aurais trouvé ça OK (car il en faut pour tous les goûts), si ce n'était pas partout, et si ce n'était pas fait au détriment des intrigues et de la cohérence qui passent en arrière-plan, et des personnages qui ne se résument plus qu'à des machines à baiser.
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Ce n'est pas un problème qui date d'aujourd'hui, d'ailleurs. Je vais vous raconter une anecdote que j'ai personnellement vécue. Vous avez le droit de me croire ou non.
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C'était en 2013 ou en 2014, je ne me souviens plus de l'année exacte. À l'époque, je publiais sur un blog Skyrock (paix à l'âme de cette plateforme) une ancienne fanfic Zelda à moi : Twilight Shadows. Une fanfiction principalement d'action, d'aventure, de drame et de fantasy, qui s'étendait sur 4 tomes et qui était globalement moins sombre et mature que Phénix Bleu. Il y avait quelques romances dedans, mais ce n'était pas les aspects les plus développées, ni sur lesquels je m'attardais. Pourtant, j'ai reçu quelques commentaires réclamant du lemon. Oui, vous avez bien lu ! Du lemon, dans une fanfic sur Zelda qui n'était pas forcément tout public, mais qui ne visait pas non plus exclusivement un public adulte/mature (C'était du PEGI 12, quoi !). Ces commentaires n'ont même pas préciser quels personnages ils voulaient dans le lemon. Ils souhaitaient juste lire du cul dans mon histoire.
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Ça m'avait fait halluciner sur le moment, et je connaissais d'autres auteurices de fanfics (pas forcément sur Zelda) qui recevaient aussi des commentaires de ce genre dans leurs histoires. Mais ça restait tout de même des cas isolés.
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Aujourd'hui, une dizaine d'années plus tard, je constate que la situation s'est empirée et s'est étendue sur les histoires originales éditées, auto-éditées ou même simplement publiées sur des plateformes comme Wattpad. J'ai récemment vu de loin une affaire de pétition pour forcer une autrice à insérer du smut dans sa romance, qui n'en contient pas. L'autrice en question avait pourtant précisé ne pas vouloir en insérer, mais ça n'a pas dissuadé ces gens d'arrêter leur délire pour autant.
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Vous vous rendez compte, un peu ? Pour ceux qui ne réalisent pas encore, je répète pour que vous assimilez bien la chose : des lecteurices sont capables d'aller jusqu'à créer des putains de pétitions, pour obliger des auteurices à insérer des scènes de sexe dans leurs histoires, en dépit de leurs volontés à ne pas en ajouter !
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Il n'y a que moi que ça choque, sans déconner ? On est où, là ? C'est grave, à ce stade ! Ces imbéciles sont au courant qu'ils n'ont pas leur mot à dire sur les histoires proposées par les auteurices ? S'ils veulent des histoires avec du cul, qu'ils les écrivent eux-mêmes au lieu d'embêter celles et ceux qui ne veulent pas céder à leurs demandes malsaines pour des raisons plus que légitimes !
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Et c'est en voyant ce genre de comportement disproportionné que je me dis que certaines personnes vont trop loin concernant le smut dans les fictions. Qu'on aime lire des scènes de sexes pour diverses raisons, passe encore. Qu'on en exige dans tous les livres qui sortent, qu'on qualifie les romances qui en sont dépourvues de niaises, incomplètes et j'en passe, et qu'on les mette sur un piédestal tout en négligeant des aspects essentiels comme l'intrigue, les personnages ou l'univers, c'est un gros NON ! Surtout si c'est pour se retrouver avec du smut à tout va, mal écrit et véhiculant des messages douteux.
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"Mais Kam, tu disais avoir inséré une scène sexuelle dans ta nouvelle histoire Neo-Tokyo Contact. Du coup, tout ton argumentaire sonne un peu hypocrite, non ?"
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À ceux qui sont tentés de me sortir ça : lisez cette histoire (pour connaître les personnages impliqués et voir l'évolution de leur relation), lisez la scène en question (si elle est déjà postée, sinon patientez jusqu'à ce que le chapitre concerné sorte), et seulement après, on pourra en discuter, de mon "hypocrisie sur le sujet".
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Bref ! Je pense avoir fait le tour de la question de manière claire et concise (j'espère ?). Je vais simplement conclure en m'adressant aux énergumènes qui ne jurent que par le smut, au point d'agir comme des tarés : le sexe, contrairement à ce que vous croyez, ne représente qu'une portion d'une relation amoureuse. Et ce n'est pas forcément la portion la plus importante, ni la plus belle à vivre. Arrêtez d'idéaliser le sexe (voire même la romance en général) comme si c'était le Saint Graal qu'un personnage de roman devrait atteindre pour être ou se sentir "complet". Il existe d'autres formes de relations intimes et d'autres types d'amour qui méritent tout autant votre attention, et qui pourraient même vous plaire si vous faites preuve de curiosité en privilégiant les histoires bien construites aux simples fantasmes.
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Si vous avez systématiquement besoin d'une dose de pénis aux tailles démesurées, de vagins/d'anus étroits, de fesses rebondies, de torses/muscles saillants ou de gros seins pour apprécier une histoire (peu importe son genre), je n'aurai qu'une seule chose à vous dire : remettez-vous en question. Sérieusement.
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Quant aux auteurices, ne laissez pas les tendances vous influencer, si vous ne souhaitez pas écrire des histoires là-dessus. Ce n'est pas parce que la demande de smut est forte que vous devez forcément y répondre. Écrivez ce qui vous fait envie et rêver sans vous préoccuper de ce que vos lecteurices désirent lire. Suivre ce genre de mode alors que ça ne nous plaît pas, il n'y a rien de mieux pour nous dégoûter de l'écriture !